Tant que durera la baisse de confiance actuelle, il faut de toute urgence imaginer chacune des issues envisageables.
En novembre 1997, notre société FDBD commençait à se faire un nom dans l’alors petit monde de l’Internet francophone, en grande partie grâce à News+, une plate-forme web de forums ergonomique, loin des surcouches de Usenet qui existaient alors majoritairement.
Nous décidons alors de lancer un portail étudiant, Cybercampus. Nous étions encore proches du monde étudiant que nous avions quitté il y a peu et nous savions que le taux d’accès à Internet de cette population était très supérieur à la moyenne (moins de 2 millions d’abonnements alors, très majoritairement à bas débit).
Et bien évidemment nous avons embarqué notre régie publicitaire dans l’affaire. Il s’agissait de Régie On Line (ROL), filiale d’Imaginet qui était alors le géant français de l’Internet. Notre contact chez ROL est très enthousiaste et nous lui proposons une démonstration sous peu.
Mais voilà… Le temps passe et le site ne bouge pas d’un iota. Le logo et le canevas de page sont prêts depuis longtemps, Benoît étant passionné de Photoshop, mais l’activité d’une société naissante laisse peu de temps à ses créateurs et faire du contenu n’est pas forcément le fort des ingénieurs.
Enfin, une semaine avant la date de rendez-vous fixé chez la régie, nous nous décidons. Nous coupons les téléphones (fixes bien sûr, nous sommes en 1997) et nous nous attelons au site.
Les différentes rubriques sont réparties entre nous trois et nous nous mettons au travail. Eric a une technique très efficace (et qui fera ses preuves) de listes de liens thématiques dont les internautes étaient très friands à l’époque. Yahoo! existait à peine et Altavista avait une image technique qui rebutait les utilisateurs.
De mon côté je fais du rédactionnel pur et dur pour l’espace pratique : rédiger un CV, conseils pour le service militaire (il était sur la fin mais existait encore), etc…
Pour la partie qui me revient dans la section Loisirs , c’est un peu la page blanche.
Jusqu’à ce que je me souvienne avoir vu une matrice de mots pipeaux, issue de l’ENA selon la légende, et publiée quelques années plus tôt dans le Piston Information, le journal de l’école Centrale. Mélangée au principe des cadavres exquis, on arrive à un résultat assez sympathique.
Certains de nos anciens professeurs d’humanités à Centrale ont été alors une source d’inspiration insondable pour écrire les 8×10 bouts de phrases tirés de leurs longues lithanies.
Le langage javascript édité par Netscape était sorti peu avant. Souvenez-vous ; c’était en 1996 et le navigateur populaire de l’époque s’appelait Netscape 2.0. Et soudain les pages web statiques, grises et laides sont devenues dynamiques, et toujours grises et laides bien sûr.
On pouvait faire des contrôles sur les formulaires, économisant bande passante (notre ligne faisait 128 kbits/s) et ressources serveur (notre unique serveur était un Pentium 133, il fallait le ménager !), changer les images lorque la souris passait dessus (nous appelions cela l’effet David Bowie, le 1er site où nous l’avons vu à l’oeuvre devant nos yeux ébahis), et plein d’autres choses encore.
Et parmi ces autres choses, on pouvait surtout reconstituer les bouts de phrase du Pipotron.
La page était prête et depuis le Pipotron a eu un succès d’estime que je n’aurais pas imaginé.
En période de campagne électorale, le site fait parfois plus de 1 000 visites par jour !
Et n’oublions pas,
Vu la crise qui est la nôtre, il serait intéressant de se remémorer la somme des problématiques déjà en notre possession.